Une question bête! Pour les espèces classifiées mortelles le sont t'elles par analyse des substances, ou bien par expériences vécues ?

Compliqué comme sujet, je réfléchis. Je sais pour les amanites et les lépiotes. Pour les cortinaires je consulte les articles ainsi que pour les galères et les inocybes, Tricholoma auratum et ses cousins et les autres. Jean Pierre connait peut-être bien. Nous te répondrons de façon plus pointue. Amicalement. Rémy.

Je me lance dans une réponse plus intuitive que livresque, les pros seront beaucoup plus complets que moi. Je pense que malheureusement, les expériences vécues ont plus contribué à la classification des espèces mortelles que l’analyse chimique des substances létales.

C’est intéressant de noter que certaines espèces considérées comme parfaitement comestibles dans un passé proche sont aujourd’hui répertoriées comme mortelles. C’est le cas par exemple de Gyromitra esculenta (interdit à la vente dans les années 90) ou de Paxillus involutus qui d’après ce que j’ai pu lire aurait entrainé le décès du mycologue Allemand Julius Schaeffer.

J'ai fait une recherche rapide sur Paxillus involutus et Gyromitra esculenta.

J'ai hérité de l'Encyclopédie Pratique du Naturaliste, Les Champignons de France de A Maublanc. Cet ouvrage (4ème édition) date de 1952.

Concernant Paxillus involutus, il est noté comme comestible sans aucun autre commentaire.

Concernant Gyromitra esculenta voici ce que l'on peut lire :

"Comestible. Ce champignon à parfois causé des accidents (voir p.CCLVII)."

Si l'on jette un oeil à cette page, on lit :

"L'acide helvellique serait l'agent toxique du Gyromitra esculenta, Discomycète qui a produit en Allemagne et en Autriche ainsi qu'en Amérique du Nord, des accidents parfois graves et mêmes mortels, bien qu'il soit couramment consommé en bien des régions.
Cet acide, soluble dans l'alcool et l'éther (...), possède en effet des propriétés hémolytiques ; mais le problème de la toxicité de la Gyromitre parait plus complexe. (...)
L'hypothèse d'une action hémolytique ne suffit pas à expliquer la toxicité des Gyromitres (...). De toutes façons la question n'est pas résolue, il semble que les Gyromitres fraiches peuvent contenir un principe actif, non détruit à l'ébullition et capable de provoquer des accidents de nature anaphylactique (?)."

On sait maintenant que la toxicité de Gyromitra esculenta résulte de la gyromitrine.

Voici ce qu'écrit Didier Michelot :

"La toxine responsable, autrefois appelée "acide helvellique" résultant d'études datant du siècle précédent [7], malheureusement encore cité dans des ouvrages actuels à usage d'enseignement, n'a plus de bases scientifiques et n'est en réalité qu'un mélange d'acides organiques, dont principalement l'acide fumarique ; ils n'ont aucun effet toxique marquant [31]. La gyromitrine - N-méthyl-N-formyl hydrazone de l'acétaldéhyde - est le principal agent toxique responsable."

La Gyromitrine serait quasiment complètement détruite après une dizaine de jours de dessiccation.

Nous sommes encore nombreux à consommer la fausse morille et en Auvergne rares sont ceux qui prennent le temps de la faire secher. Ce que je viens de lire m'amène à changer mon point de vu. Il semblerait en effet, que la Gyromitrine et ses dérivés aient une action cancérigène démontrée sur la souris :

"Des études antérieures sur une action cancérigène - à longue période de latence - des hydrazines et de leurs dérivés ont été appliquées aux substances contenues dans G. esculenta [132]. Elles ont démontré que la méthylhydrazine, et bien sûr ses dérivés, accroissent de façon significative le développement de tumeurs du poumon chez la souris ; de même, l'administration quotidienne d'une solution à 0,01% de MMH à des hamsters induit des tumeurs du foie, de la vésicule biliaire, des canaux biliaires, et du caecum [131] Des résultats similaires ont été obtenus après ingestion quotidienne ou instillation gastrique de gyromitrine. L'ensemble des données a conduit à classer la gyromitrine dans les substances cancérigènes présentes dans la nourriture [54]. (Didier Michelot)"

La science a clarifié une situation encore confuse dans les années 1950, mais combien de personnes ont été victimes de Gyromitra esculenta entre cette époque et son interdiction de commercialisation en 1991 ?

Les champignons nous réservent encore bien des surprises, souvent bonnes mais pas toujours...

A lire pour en savoir plus :

Didier Michelot :" Intoxications par les champignons : les syndromes redoutables".

Bonjour,
Personnellement, je pense que les deux cas de figure coexistent.
Vous trouverez sur le web. en cliquant sur google en mentionnant: "champignons toxiques yves deneyer" un article très intéressant sur le sujet quoique ne répondant pas à votre question.
Cordialement.

Pierre.